M. le marquis d'Hericourt, commandant le régiment du roi vient à Nancy prendre connaissance des logements militaires.
Cette nuit après de grandes chaleurs et beaucoup de sécheresse il a tombé un peu de pluie. Et cet après midi de la grêle melée de pluie.
On m'écrit de Commercy le 2 que le roi continue a jouir d'une bonne santé et qu'il sera difficile de le disuader du voyage de Versailles. Qu'il y a un loup d'Ardennes aux environs de Sampigny et de Mescring qui y répand l'alarme : il a déjà attaqué et mordu grièvement un homme et une femme.
Madame la duchesse de Grammont part de Nancy pour Commercy l'après midi. Mort de madame (blanc) Rorté, agée de 84 ans, mère du marquis Dessalles.
L'abesse de S. Louis de Metz arrive à Commercy et madame la duchesse de Grammont presque en même temps.
Le lendemain madame la princesse de Saxe coadjutrice1 de Remiremont y arrive aussi.
1. Religieuse adjointe à une abbesse ou à la supérieure d'un couvent et destinée à lui succéder.
M. Thibault de Monbois, maître des comptes1, épouse M.lle Friant, élève de S. Cyr.
1. Les maîtres des comptes sont chargés en premier lieu de veiller à la bonne rentrée des recettes du domaine royal et, en second lieu, de contrôler les dépenses publiques.
Une voleuse a été pendue. Elle avait servi dans plusieurs maisons de Nancy et accusait tous ses maîtres. Elle avait volé chez M. Mengin sous prétexte d'y faire sa déclaration de grossesse.
Un courrier arrive à Commercy, portant la nouvelle que la reine de France partira de Compiègne le 17 pour venir en Lorraine voir le roi son père.
Cette nouvelle nous fut apportée le 6 par M. l'intendant et M. l'abbé de S. Mihiel, qui partiront demain pour Neuviller.
Mort de madame Catalde, supérieure des dames prêcheresses1.
La duchesse de Grammont arrive à Lunéville à 7 h 1/2 du soir
1. Une léproserie fut créée à Nancy au début du XIIIe siècle pour limiter la propagation de la maladie et secourir les malades. Elle se situait à proximité de l'Hôpital central actuel. Un accord intervint en 1221 pour répartir les tâches et établir un accord financier entre les frères chargés de la maison des lépreux et les moines du prieuré Notre-Dame. Au XIVe siècle, l'établissement fut confié aux dames prêcheresses, en fait les dominicaines qui disposaient d'un important monastère en Vieille Ville ("Les fondations hospitalières à Nancy" / J-P. Grilliat in Encyclopédie illustrée de la Lorraine).
Elle part le lendemain, entrainant les dames, les officiers, total 32 chevaux.
On n'a pu dissuader le roi de son voyage ordinaire de Bonsecours, pour la Notre-Dame de demain ; et Sa Majesté est arrivée à la Malgrange cet après midi, vers 5 h 1/2. M. le chancelier était dans la même voiture. La suite fort peu nombreuse.
M. le chancelier a reçu à la Malgrange, un courrier de France à une heure du matin, touchant les dispositions du voyage de la reine. Il avait déjà envoyé à M. l'intendant à Neuviller, la lettre et les états de M. le comte de S. Florentin. À 4 h. du matin M. le chancelier est parti pour Lunéville où il a tenu l'audience des sceaux, et il est arrivé à 10 h 3/4 aux minimes de Bonsecours1, au moment que Sa Majesté allait s'y mettre à table. Sa Majesté a mangé au réfectoire et était en voiture pour Commercy un peu avant midi. Elle a reçu avec bonté toutes les personnes que l'affection, où la curiosité avaient amenées. Il y a eu beaucoup de peuple à son passage et à son départ. On n'a remarqué à l'extérieur aucun signe de dérangement et d'altération dans la santé du roi. Mais hier à son arrivé elle souffrait d'une espèce de rétention d'urine, occasionnée par le voyage.
1. L'ordre des Minimes est un ordre de religieux mendiants et pénitents,fondé en 1736 par François de Paola. Chapelle et ermitage furent établis en 1484, sous règne de René II, sur le ieu d'inhumation des soldats morts lors de la bataille de Nancy. Sanctuaire et ermitage, placés sous la protection de Notre-Dame-de-Bonsecours par le duc, sont aussi nommés église Notre-Dame de la Victoire, ou chapelle des Bourguignons.
On m'écrit de Commercy que Sa Majesté Polonaise y est arrivé hier en bonne santé, et y a trouvé le duc de Fleury, gouverneur de la province, qui y restera pendant tout le voyage de la reine.
M. l'intendant a passé à Nancy venant de Neuviller, avec M l'abbé de S. Mihiel son frère. Ils sont partis après dîner pour Commercy, avec mon frère le commissaire M. le duc de Fleury et M. de La Galaizière intendant, doivent aller à Saudrupt demain au devant de la reine.
On m'écrit de Commercy « M. l'intendant arriva hier vers 8 h 1/2 il est parti cet après midi avec M. le duc de Fleury, pour se rendre à Bar. Notre frère les dévance de quelques heures pour aller s'assurer des dispositions arrêtées pour le service. La reine dînera à Saudrupt, et arrivera demain vers 4 ou 5 h. On croit que le roi ira à sa rencontre jusqu'à S. Aubin ; on voudrait qu'il n'alla qu'à la fontaine royale. Toutes les maisons des bourgeois sont remplies ».
L'hôtel de ville qui avait remis son repas de la S. Roch1 du 16, l'a donné aujourd'hui aux capucins2. Les deux procureurs et généraux y étaient. En tout 23 personnes.
1. Dévoué aux soins des pauvres et pestiférés, Saint Roch (1300?-1380) fut lui-même atteint par la maladie, dont il guérit miraculeusement, après s'être retiré,alors mourant, dans une cabane où un chien lui apportait chaque jour du pain. Saint Roch, dont la fête votive est célébrée le 16 août, est donc le protecteur invoqué lors des épidémies de peste, mais aussi contre les maladies.
2. Religieux de l’Ordre de saint François d’Assise (tout comme les frères franciscains et les frères conventuels), dont l'ordre s'installe à Nancy en 1592.
Assemblée du bureau de l'aumône, où étaient Messieurs Du Rouvrois, de Dombâle, de Tervenus et de Bressey, et moi. On a proposé de préter à la ville 8000#. sur environ 8600 que l'empereur a fait payer au bureau, d'arrerages d'aumônes, en remboursant quand on avertirait à 3 mois d'avance, et payant les intérêts à 5 p % en attendant. Messieurs de Tervenus et de Bressey ont pretendu par des raisonnements de théologiens que cela n'était pas permis. On a remis l'examen à une assemblée plus nombreuse.
Lettre de mon jeune frère, écrite de Commercy. «
La reine arriva
hier vers six heures du
soir. Le roi étoit
allé à sa rencontre jusqu'à
S. Aubin, où il attendit
plus de trois heures.
C'est là que s'est faite la première entrevue
de leurs Majestés dans la maison de Schmidt ...
Bien en a pris à M.
l'intendant d'être allé
en avant, car sans cela la reine, qui s'attendait
que le roi son père
lui donnerait à dîner à
Saudrupt, n'y aurait
rien trouvé. Ce ne fut
que par hazard que M.
l'intendant
apprit
bien avant dans la nuit du samedi au
dimanche au lundi qu'il n'y avait
aucune disposition
faite pour recevoir la
reine ... Le lundi
à midi il a fait servir sept tables1. Notre
frère a fait en cette occasion l'office de
contrôleur de la bouche2, et
il est resté pour
arrêter les comptes et solder. madame de Najac
et M. sont logés dans mon
corridor, madame
Thibault et M.lle Marchand en sont tous
à portée. »
1. Série de repas servis successivement. Synonyme de service (CNRTL).
2. Contrôleur ordinaire de la Cuisine-bouche : contrôle les livraisons des fournisseurs
Madame la princesse de Saxe a passé à Nancy, venant de Commercy et retournant à Remiremont.
On a su par le courrier d'Allemagne de ce matin que l'empereur était mort. Cette nouvelle m'a été confirmée l'après midi par mon frère qui arrivait de Commercy. M. le marquis du Chastelet en avait eu une lettre de M. de Lomont.
La reine est allée à la fontaine royale. Elle a pris trois oiseaux à la pipée1, leur a fait laver les aîles et leur a rendu la liberté.
1. Chasse aux oiseaux qui s'effectue le matin, après les avoir attirés avec des gluaux et des pipeaux en contrefaisant leurs différents cris, notamment le cri de la chouette
Je suis allé à Commercy, où j'ai appris les particularités de la mort de l'empereur, arrivé à Inspruck, où le duc Léopold son père était né en 1679. J'ai vu M. le chancelier ; M. l'intendant qui allait partir pour Neuviller. Le roi avait ordonné à M. Alliot de me présenter à la reine, mais je n'ai pas eu de temps, et il fallait d'abord voir madame de Noailles. Le roi et la reine mangeoient à une même table, l'un vis à vis de l'autre. Point d'autre homme que le roi ; environ 15 dames. Madame la duchesse de Duras est jeune et belle. Les 3 évêques étaient à Commercy ; il y est venu des jésuites de Nancy. La reine était sur le point d'aller au pavillon lorsque je suis reparti pour revenir à Nancy. La nuit m'a pris en sortant de Toul.
Après midi 25 1/2 degrés de chaud.
À Commercy la ville avait fait élever
un arc de triomphe1, avec des devises et des
inscriptions emblématiques, en
face du
château. Cet édifice fut illuminé. Le 24
la reine s'avança
dans la rue au dehors
du château, et sa présence inattendue combla
la satisfaction des bourgeois. L'affluence
des gens de la campagne et des villes voisines
aup a donné un spectacle intéressant
toute la journée. La multitude a rempli
jusqu'à la nuit les cours, les salles et les
jardins du château ; elle vient encore d'assiéger
les fenêtres de la
reine, qui s'en fait voir.
Il y a ordre de laisser entrer tout le monde
pendant le dîner.
Clement Hogard incendié à Ville en Vermois, 22 chevaux brulés &a.
1. À l'origine, les arcs de triomphe sont des structures temporaires en bois. Ensuite réalisés en pierre, la Renaissance voit à nouveau l'usage de matériaux fragiles (bois, toile peinte, plâtre imitant les veines du marbre ou de matériau précieux) pour des monuments d'un caractère provisoire destinés à l'entrée triomphale des hauts personnages dans les villes. Marque d'hommage, et souvent prouesse architecturale éphémère, l'arc peut servir aussi de décor, de scène théâtrale ou musicale.
15 degrés de chaud à 7 h. du matin 25 à midi.
Le duc de Fleury passe incognito
Le Sain pour retourner à Commercy.
Madame la comtesse de Noailles, madame la duchesse de Duras et M. le marquis de Saulx arrivés de la veille partent pour Lunéville, après avoir vu l'intendance la rotonde, l'hôtel de ville &a.
La chaleur était accablante, mais après un grand vent qui élevait la poussière aux rues, il a tombé un peu de pluie vers 3 h 1/2 après midi.
Les 1.er et 3.e bataillons du régiment du roi arrivent vers dix heures du matin. Ils avaient fait halte près de la belle croix pour changer de linge &a.